Johnny Hallyday
Jean-Philippe Smet naît à Paris le 15 juin 1943. Le divorce de ses parents (un mère française, un père belge) l’oblige à suivre Hélène Mar, la soeur de son père et ses deux cousines Desda et Menen. Le jeune adolescent évolue alors dans le monde du cabaret. Il interprète de temps en temps un numéro dans le spectacle familial. Il trimballe ses valoches de Londres à Copenhague, apprenant son métier de saltimbanque. De retour à Paris, il découvre un courant musical en pleine explosion, le rock’n’roll. Il n’est alors rien qu’un petit guitariste franco-belge, fan d’une nouvelle idole, Elvis Presley.
En 1959, il tente ses premières expériences au Golf Drouot où il reprend des standards country et des adaptations françaises de chansons américaines. Après un passage à la télévision dans l’émission Paris-Cocktail, il obtient une signature dans la maison de disques Vogue. Le 14 mars 1960, le 45 tours 4 titres « T’aimer follement » (reprise de Dalida) passe à la radio. Jean-Philippe Smet s’appelle désormais Johnny Hallyday, du nom du mari de sa cousine Desda. Johnny enchaîne les premières parties de Sacha Distel et Raymond Devos.
Johnny Hallyday représente la vague yéyé dans toute sa splendeur. Sans vraiment ressembler à ses petits copains de gomina. En 1961, il forme un groupe de musiciens, les Golden Strings. Il écume les salles de concert avant de s’en faire interdire ! De nombreuses bagarres se sont produites provoquant des dégâts matériels. Johnny, la terreur de service ? Son regard d’acier, son déhanché sexy et sa timidité impressionnent plutôt Johnny Stark qui lui fait signer un contrat chez Philips. Il fait alors son premier Olympia.
Johnny fait également une apparition dans Les Parisiennes où il interprète « Retiens la nuit ». Pour autant, Johnny reste une star yéyé. Il sort l’album Salut les Copains, du nom du journal dans lequel il a la première place des colonnes. 1962 : Johnny vend beaucoup de disques, un million de 45 tours de « Let’s Twist Again ». Il ne chante donc pas toujours en VF. L’ombre du King rôde. Si bien que Johnny part enregistrer à Nashville avec les musiciens de Presley, Johnny Sings America’s Rocking Hits.
Johnny Hallyday a seulement vingt et un ans, une carrière déjà remplie et une kyrielle de fans. Et « l’amuuur » dans tout ça ? Johnny le rencontre sous les traits d’une autre icône yéyé, Sylvie Vartan. Le début de sa relation fusionnelle avec les paparazzis. Un Johnny, une femme, une photo. Cet amour ultra médiatisé avec Vartan n’empêche pas Johnny de mener sa jeune carrière.
Il enregistre le 8 juin 1963, le morceau culte « L’idole des jeunes ». Un titre honorifique qui se confirme lors du grand concert Salut les Copains, place de la Nation où deux cent mille personnes sont venues l’applaudir. Du coup, Johnny entre au Musée Grévin, inaugure le nouveau Golf Drouot et tourne le film D’où viens-tu Johnny ? D’où viens-tu et surtout où vas-tu ? Au service militaire ! Johnny a le droit d’honorer ses contrats mais il est déclaré apte à porter l’uniforme.
L’année 1964 transporte donc Johnny de plateaux de cinéma (Cherchez l’idole) en casernes militaires, notamment à Offenbourg en Allemagne. Néanmoins, Johnny sort également un de ses plus grands succès « Le pénitencier ». Ce tourbillon de vie n’a rien de comparable à ce jour du 12 avril 1965. Johnny Hallyday épouse Sylvie Vartan dans une atmosphère d’émeute nationale ! A la fin de l’année, il enregistre un nouvel album entièrement écrit par lui Johnny chante Hallyday.Johnny a beau apparaître serein sur la mythique photo de Salut les Copains du 12 avril 1966, il n’en a pas moins l’esprit tourmenté. Le chanteur a des soucis avec le fisc ; passe son temps dans les avions et prend juste quelques minutes pour saluer la venue au monde de son fils David. Son mariage bat déjà de l’aile. Il fait alors une tentative de suicide le 10 septembre 1966. De quoi faire un nouveau succès, « Noir, c’est noir » traduit de « Black is black » (Los Bravos).
Il sort un album au titre éloquent La Génération Perdue. Un disque qui contient la chanson « Cheveux longs, idées courtes », une spéciale dédicace pour Antoine. La trêve a eu lieu, les deux ex ennemis faisant désormais de la publicité pour une marque d’opticien… Johnny est également l’incarnation vivante de l’artiste en scène. Il n’a cessé de sillonner les routes internationales jusqu’à l’Amérique du Sud où il se produit en 1967. Les disques, les tournées, la vie de famille. Johnny semble avoir tout vécu. Il fête alors en 1969 ses dix ans de carrière au Palais des Sports. Johnny inaugure une de ses chansons inoxydables : « Que je t’aime ».
Dans les années 70, Johnny Hallyday n’est-il pas déjà une caricature de lui-même ? Il tente de surprendre son public de diverses manières. Il y aura d’abord le 45 tours « Jésus-Christ » écrit par Philippe Labro. Le jeune journaliste a fait de Jésus un héros hippie qui traîne sa marijuana dans les allées de Woodstock.
Johnny souhaite aussi se diversifier en créant sa propre firme de disques, les disques H. Il sort un premier 45 tours « Apprendre à vivre ensemble » en duo avec une de ses choristes Nanette Workman. En 1972, le public de Johnny n’est pas au bout de ses surprises. Le chanteur s’embarque dans une drôle d’aventure artistique : Le Johnny Circus, grosse machine avec des jongleurs, des chapiteaux et de la musique. Le fiasco absolu. Johnny se remet alors dans le droit chemin de la musique américaine, avec l’album Country Folk Rock. Il participe également à la bande originale de L’Aventure, c’est l’aventure de Claude Lelouch où il joue son propre rôle.
A l’époque, l’aventure pour Johnny consiste à sauver son couple. Le duo Hallyday-Vartan se retrouve le temps d’une chanson « J’ai un problème ». Un des gros succès de l’été 1973. Cette année-là, l’album Insolitudes révèle également le hit absolu « La musique que j’aime ».
En 1974, Johnny Hallyday, le blouson noir de toute une génération réalise un de ses rêves : chanter dans une prison. Il y parvient grâce à la Suisse qui lui ouvre les portes du pénitencier de Bochuz ! Johnny part également à Memphis pour l’enregistrement d’un album. Néanmoins, Johnny semble vouloir faire un break. « J’ai oublié de vivre » dit-il plus tard dans l’album C’est la vie. Cette fois-ci, Johnny déchausse ses santiags pour de bon. Il entraîne sa femme et son fils à Los Angeles, loin des flonflons du rock’n’roll…et du fisc.
Un coffret de dix 33 tours conclue ces années de folie : Hallyday Story. Johnny en a-t-il marre de chanter l’amuur et ses vicissitudes ? Il sort alors en 1976 un album concept tout à fait hors normes dans sa carrière : Hamlet Hallyday. Cet opéra rock inspiré de la pièce de Shakespeare, écrit par Gilles Thibaut et composé par Pierre Groscolas se révèle être un énorme échec commercial. Johnny n’a pas réussi à entraîner son public dans un univers décalé.
Néanmoins, Johnny sait toujours rappeler les fidèles à l’Eglise. Il annonce son retour sur scène, après cinq ans d’absence. Des petits malins avaient annoncé la fin de Johnny. Or, le seul deuil que porte Johnny concerne le décès de son idole : Elvis Presley meurt le 16 août 1977. L’année suivante, Solitude à Deux annonce son imminente rupture avec Sylvie Vartan. Le divorce est prononcé le 5 novembre 1980.Johnny Hallyday a désormais tout d’un mythe vivant mais un peu cabossé par l’existence. Celui qui a failli mourir dans un accident de voiture (le 20 février 1970 en compagnie de Sylvie Vartan) enregistre l’album En Pièces Détachées (1981). Mis à part le 45 Tours « Ma gueule », Johnny n’arrive pas à sortir d’une période artistique morose.
Il en reste des albums incolores dont Quelque Part Un Aigle ou la pochette la plus kitsch du monde ! Johnny ressemble à un héros de science-fiction franchouillard, notamment dans le spectacle Le Survivant inspiré de Mad Max ! Une jolie fée du nom de Nathalie Baye va en l’espace de quelques mois lui faire troquer son blouson Hells Angels contre un imperméable beige. En effet, la mère de sa fille Laura l’entraîne dans son univers intello. Johnny tourne d’abord Détective sous la direction de Jean-Luc Godard.
Il s’interroge également sur ses choix musicaux. Il fait alors la rencontre de Michel Berger qui lui écrit un album sur mesure : Rock ‘n’ Roll Attitude. La pochette de l’album, en noir et blanc, montre un Johnny la quarantaine radieuse, clope au bec, rendant hommage à James Dean. Le départ d’une nouvelle carrière. Michel Berger n’a rien d’un costaud en marcel mais il a compris ce qui plait tant au public de Johnny depuis des années : ses failles. Johnny chante « Le Chanteur abandonné », « Seul mais pas solitaire » et l’inoubliable « Quelque chose de Tennessee » (hommage à l’auteur américain Tennessee Williams). Rock ‘n’ Roll Attitude remporte un énorme succès.
Johnny Hallyday cherche désormais des chansons travaillées dans l’or et le souffre. Des morceaux violents et intimes à son image. Il fait alors appel à une autre vedette des années 80, Jean-Jacques Goldman. Celui-ci lui écrit l’album Gang. Et des succès à la pelle : « L’envie », « Je te promets » ou « Laura ». Johnny n’en fait plus des tonnes sans perdre ce qui fait son essence. A cette époque, sa voix semble d’ailleurs être au summum.
En 1987, Johnny remonte sur scène, à Bercy dans une mise en scène de Michel Berger. 1989 : Johnny prend les traits de David Lansky, un flic assez proche de son personnage public. A l’occasion de son quarante- sixième anniversaire, il sort l’album Cadillac. Il collabore avec divers artistes dont son fils (« Mirador ») et Etienne Roda-Gil (« Si j’étais moi »). Il participe également à la tournée des Restos du Coeur avec Eddy Mitchell et Michel Sardou. La même année, Johnny perd son père Léon Smet, qu’il a si peu connu et dont il parle dans le 45 tours « A propos de mon père ». Il termine les années 1980 avec un énorme show, Dans la Chaleur de Bercy. Ce spectacle obtient la Victoire de la musique pour la « Meilleure prestation musicale ».
L’album Ca Ne Change Pas Un Homme, sorti en 1991 connaît probablement moins de succès que les précédents. Il y a comme un air de déjà entendu. Johnny tourne aussi un nanar qui étoffe sa filmographie inclassable : La gamine d’Hervé Palud. Ces années-là, Johnny devient à ses dépens une sorte de pantin médiatique. La presse a toujours traqué ses histoires privées. Désormais, la moindre banalité sortie de sa bouche fait le bonheur des humoristes. Notamment des Guignols qui ne l’épargnent guère dans la fameuse « boite à coucou ».
15 juin 1993 : Johnny fête ses cinquante ans au Parc des Princes. Quelques bougies, une scène et des milliers de fans. Il fait alors une entrée pour le moins périlleuse en traversant le public. Aucun garde du corps n’est libre sur Paris ce jour là ! En 1995, il retrouve Jean-Jacques Goldman pour l’album Lorada. Mais il n’y a pas de perles comme dans Gang. Après trois mariages, Johnny passe à nouveau devant le maire pour épouser Laetitia Boudou. A la fin de l’année 1996, il part à Las Vegas, pas pour divorcer mais pour donner un concert unique.
Des concerts, les perpétuels honneurs, un nouvel album. Johnny poursuit son train-train de rocker. A la fin des années 90, il devient une sorte de « boîte à jackpot » pour les jeunes artistes français. Tout le monde tente de se mettre dans la peau de Johnny. Pascal Obispo, nouvelle star pop française prend la place de Jean-Jacques Goldman pour la réalisation de l’album Ce Que Je Sais. Ce disque, sorti le 24 janvier 1998 contient le méga tube « Allumer le feu ». Johnny retrouve l’énergie d’antan.
Seulement, le feu s’éteint parfois, surtout lorsqu’il pleut sur le Stade de France… Johnny doit annuler le premier de ses trois gigantesques concerts. Jean-Claude Camus, son producteur annonce aux 80 000 personnes du Stade qu’EDF ne leur doit pas toujours plus que la lumière. Après ces moments de plein air, Johnny enregistre un de ses meilleurs albums : Sang Pour Sang, chanson écrite par son fils. Le disque se vend à deux millions d’exemplaires. Universal réédite alors les quarante albums studio de Johnny. Le grand procès des années 2000 entre la major et Johnny aboutit à un échec pour le chanteur. Il ne récupèrera pas ses bandes originales.
2000 : Johnny renoue avec le cinéma. Il interprète un personnage de loser dans Love Me de Laetitia Masson. Johnny se remet également à l’oeuvre pour un nouvel album. La chanson « Marie », écrite par Gérald De Palmas rencontre un vif succès. Ce qui l’amène encore au Parc des Princes pour son soixantième anniversaire. Il y fait un duo avec Isabelle Boulay et Jenifer. Car Johnny a toujours su s’entourer d’artistes à la mode. Ma Vérité, son nouvel album emploie des gens aussi divers que Kyo, Ministère Amer ou Muriel Robin ! Ce que l’on retient au fond de ce disque ? « Mon plus beau Noël », une comptine (signée Fred Blondin) qui résume les deux dernières années médiatiques de Johnny.
Il a fait mille couvertures pour annoncer l’adoption d’une petite chinoise, du nom de Jade. Flashback, la tournée des grandes salles de sa carrière est en partie dédicacée à la petite fille. L’histoire de Johnny se répète. À la vie, à la mort.
Que serait Johnny sans ses fans ? Et vice-versa ? C’est l’histoire du film Jean-Philippe. Johnny y joue son propre rôle. Ou presque. Johnny a su endosser son costume d’idole sans oublier le Jean-Philippe Smet qui dort. C’est ce qu’on appelle la rock’n’roll attitude ?
A l’automne 2008 paraît Ça Ne Finira Jamais : belle conclusion pour le plus grands des rockers français qui annonce son retrait de la scène à l’horizon 2010. Le 28 septembe 2009 sort le double album de la dernière tournée Route 66 qui est aussi l’un de ses meilleurs enregistrements en public. Une tournée perturbée par quelques soucis de santé (grippe A, polype du côlon). En 2010, Johnny est sur tous les fronts des faits divers entre l’exil à Los Angeles, le procès contre son chirurgien le docteur Delajoux, le remplacement de son manager historique Jean-Claude Camus par Gilbert Coullier…et l’enregistrement d’un nouvel album baptisé Jamais Seul. Pour cette nouvelle tranche de rock délivrée le 28 mars 2011, la légende nationale a cette fois-ci fait appel à Matthieu Chédid et à son coach sportif promu parolier et de nouveaux musiciens censés donner un coup de jeune à la machine.
Le mythe est toujours debout en novembre 2012 quand sort L’Attente, l’album que les fans n’attendaient plus et marque le retour de Miossec qui en signe sept titres dont le premier extrait « L’Attente ». Ce quarante-huitième album mi-électrique, mi-acoustique orchestré par Yvan Cassar comporte également le duo « L’Amour peut prendre froid » avec Céline Dion, le distingué « Un tableau de Hopper » et « Prière pour un ami », disponible dans l’édition de luxe. Johnny Hallyday fête en 2013 ses 70 ans sur scène avec le Born Rocker Tour qui fait une escale le 15 juin à Paris-Bercy pour un show exceptionnel retransmis sur la chaîne TF1. Il donne le même soir un concert plus intimiste au Théâtre de Paris avec la participation de Brian Setzer. Le 25 novembre sort l’album live Born Rocker Tour qui clôt cette belle année.
Johnny Hallyday exporte début 2014 le Born Rocker Tour en Amérique du Nord, avant d’occuper durant six soirées la scène de Paris-Bercy en novembre en compagnie de Jacques Dutronc et Eddy Mitchell pour le spectacle Les Vieilles canailles, faisant également l’objet d’une multi-diffusion dans les salles de cinéma. Le 17 novembre sort Rester Vivant, enregistré à Los Angeles avec le producteur Don Was. Il contient des collaborations avec Yodelice, Jeanne Cherhal et Yarol Poupaud. L’année suivante, c’est toujours à Los Angeles qu’est confectionné son cinquantième album studio, De l’Amour, réalisé par Yodelice. Du côté des textes sont appelés Jeanne Cherhal, Vincent Delerm, Miossec, Jean-Dominique Burgaud et Aurélie Saada (du duo Brigitte).
Idole de plusieurs générations, le rocker français le plus populaire se bat depuis plusieurs mois contre un cancer du poumon lorsqu’il décède à son domicile de Marnes-La-Coquette (Hauts-de-Seine), le 6 décembre 2017, à l’âge de 74 ans. La nouvelle crée une vague d’émotion sans précédent et ses obsèques, en l’église de la Madeleine à Paris, ont valeur d’événement national. Alors que sa succession donne lieu, après la divulgation de son testament, à un procès entre, d’une part, Laeticia Hallyday et de l’autre, David Hallyday et Laura Smet, son dernier album enregistré, Mon Pays C’est L’Amour, connaît une sortie posthume quelques mois plus tard, le 19 octobre 2018. Un dispositif médiatique et commercial jamais vu est préparé avec la mise en place de 800 000 exemplaires, ce qui en fait un disque de platine certifié à sa sortie.